Un 100 % Piquepoul en AOC Picpoul de Pinet au Domaine de la Croix Gratiot
Le Domaine de la Croix Gratiot est situé sur le terroir des appellations Languedoc et Picpoul-de-Pinet et sur les collines argilo-calcaires qui entourent par le nord le bassin de Thau. Vignoble familial de 35 hectares, où Yves, et sa fille, Anaïs Ricôme, travaillent de concert pour créer des vins d’une grande qualité. Les abonnés Trois Fois Vin des box Tastevin et Buissonniers du mois d’avril vont découvrir une pépite méconnue : un 100% piquepoul.
Anaïs Ricôme, quelle est l’histoire du Domaine de la Croix Gratiot ?
La propriété a été achetée au début des années 80 par mon père Yves et mon oncle Hugues. Au départ, ils emmenaient la production des 60 hectares de raisins à la cave coopérative. Comme au début des années 80 la production n’était pas très rentable, ils se sont donc développés sur l’activité du melon avec l’achat de 200 hectares de terres supplémentaires. Dans les années 2000, mon père qui avait quand même toujours rêvé de faire son propre vin a décidé de monter une cave particulière pour vendre en vrac, toujours avec mon oncle. Ils se sont entourés, mais sans véritable force commerciale pour écouler la production, ça a été plutôt difficile pour eux. Au bout de 3 ans, mon oncle a préféré vendre ses parts.
C’est là, que vous intervenez ?
Oui, au départ, j’ai fait un BTS viti-oeno et un D.U. d’Analyse Sensorielle à l’Université du vin de Suze la Rousse. Quand mon oncle a voulu partir de la société en 2007, ils m’ont dit « soit on vend tout soit tu reprends ». J’avais 23 ans, j’avais plutôt envie de voyager, faire des vinifications à travers le monde ! J’ai donc décidé de faire une saison complète avec eux, et je leur dirai ensuite ma décision. Sauf que 60ha, c’est énorme. À peine vous avez terminé de labourer qu’il faut déjà recommencer. C’était vraiment très dur, je faisais 60 à 80 heures par semaine. Je me suis rendue compte que ce n’était pas cela dont j’avais envie. C’était trop gros pour moi. Je suis finalement partie faire quelques mois en Nouvelle Zélande où j’ai acquis une solide expérience d’assistante vigneronne à Saint-Clair (Marlborough) et Craggy Range (Hawkes Bay). Et au hasard de retrouvailles avec des copains de promo, j’ai eu un déclic. J’ai réalisé que j’avais une chance incroyable d’avoir la possibilité de posséder mon propre domaine. Je suis rentrée en 2009, avec une condition en poche, celle de « ne garder que 30 hectares » et d’essayer de développer et valoriser notre travail au maximum. J’ai voulu conserver une taille familiale, privilégier la qualité et l’originalité de nos vins et cépages. Je suis donc restée associée à mon papa, Yves. Lui, principalement sur l’exploitation des melons que nous avions toujours et moi à la vigne.
Qu’avez-vous développé à la reprise ?
Il a fallu tout mettre en place, et très vite, j’ai été très intéressée par la culture biologique et biodynamique. Mon père était, quant à lui, assez fermé à ces techniques culturales. Il ne les connaissait pas. Autant à la cave j’avais carte blanche, autant à la vigne ça a été plus compliqué. Mais j’ai insisté et il m’a laissé commencer sur une rangée, puis sur 16, etc. Fin 2015, l’activité s’est bien développée, j’ai voulu embaucher quelqu’un et il m’a dit « écoute, j’ai 57 ans, c’est maintenant ou jamais, j’arrête la production de melon et je viens travailler avec toi à plein temps ». Et depuis, nous nous sommes formés tous les deux à la biodynamie pour avoir une approche parallèle et commune du respect au plus près des exigences et de l’harmonie de Dame Nature.
Le Domaine de la Croix Gratiot est donc en culture biologique ?
Oui, nous sommes en 3e année de conversion, donc le millésime 2021 sera officiellement certifié en culture biologique. Nous pratiquons la biodynamie sur tout le domaine, mais sans chercher forcément, pour le moment, la certification. Nous y viendrons sans doute dans les années à venir, mais nous avons besoin de temps pour apprivoiser toutes les facettes de la biodynamie.
Avez-vous été touchés par le gel de ces dernières semaines ?
Oui, énormément, nous avons 18 hectares gelés à 100 %. La vigne est complètement bloquée depuis. En général, la vigne va repousser, mais de façon chaotique par les bourgeons qui à la base ne seraient pas partis donc avec beaucoup de plantes et sans forcément donner un fruit. Nous verrons dans les jours et semaines à venir son évolution.
Comment avez-vous rencontré Marie-Dominique Bradford de Trois Fois Vin ?
Au départ, par hasard, sur un salon de vin. Elle a dégusté mes vins et un mois après notre rencontre ma cousine m’a offert un abonnement à la box de Trois Fois Vin sans savoir que j’avais rencontré Marie-Dominique. J’ai donc eu l’occasion de la recontacter, la boucle était bouclée.
Quel est l’avantage pour vous d’être diffusée dans une box telle que celle de Trois Fois Vin ?
L’avantage est multiple, déjà Picpoul de Pinet est une toute petite appellation qui a toute sa place dans ce genre de box, pour faire découvrir des terroirs et des vins méconnus. Ensuite en termes de visibilité, ça rassure le consommateur d’être guidé par une vraie passionnée et connaisseuse. Ensuite, Marie-Dominique offre un focus sur une appellation qui n’était pas très qualitative, il y a une trentaine d’années. Nous souffrions encore de cela. De manière globale, un travail qualitatif énorme a été fait depuis plusieurs années et c’est bien de réconcilier les gens avec le Picpoul de Pinet.
Les abonnés des box Tastevin et Buissonniers du mois d’Avril vont découvrir votre cuvée en appellation Picpoul de Pinet 2020, le cépage Piquepoul est assez rare, quels sont ses atouts ?
C’est vraiment un cépage languedocien, qui remonte au 16e siècle au bord de l’étang de Thau dans un triangle formé par les villes de Agde, Pézenas et Sète. Le piquepoul peut se décliner en blanc, gris et noir. C’est un cépage tardif pour la région que nous ne vendangeons que fin septembre. Il a une très belle acidité, très frais et très vif.
Le cépage se nomme « Piquepoul » et l’appellation « Picpoul de Pinet », qui est le premier arrivé ?
Son nom piquepoul viendrait du fait que ses rameaux étant étalés sur le sol, les grappes étaient à portée de bec … des poules ! Le cépage s’est toujours appelé comme ça, du coup l’appellation s’est adaptée au nom du cépage autochtone, et Pinet c’est la commune centrale de l’appellation. Le village se situe à 25 minutes de la ville d’Agde. Comme l’INAO ne souhaite pas qu’une appellation porte le nom d’un cépage, l’orthographe a été quelque peu modifiée.
La bouteille a une forme particulière, comment est-elle conçue ?
Elle a été spécialement créée par le syndicat, pour l’appellation en 1995. C’est un vrai travail d’identification visuelle des vins de l’appellation Picpoul de Pinet sur le marché. On y retrouve la croix du Languedoc, juste au dessus, les vagues de la mer, et le socle est en colonnes romaines parce que nous sommes traversés par la voie Domitienne. C’est la première route construite par les Romains en Gaule, elle franchit les Alpes au col de Montgenèvre, jusqu’à l’Espagne en passant par la vallée de la Durance, le Luberon nord, Nîmes et elle suit la côte du golfe du Lion.
Avec quoi cette cuvée Picpoul de Pinet 2020, est-elle idéale à accorder ?
C’est un vin très frais, très franc, facile, aérien, assez salin sur la finale. Il a un nez séduisant de fleurs blanches et d’agrumes. Dégustez-le dans l’année pour garder ce côté peps, en apéritif, ou avec quelques poissons pas trop cuisinés, et des sushis. Nous, nous l’associons avec les huîtres de Bouzigues produites dans l’étang de Thau. C’est un accord idéal.
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