“Sol” la cuvée solaire des Corbières
Entourés de garrigue et de forêt, Karine et Nicolas Mirouze du château Beauregard-Mirouze dans les Corbières, proposent aux abonnées Trois Fois Vins des box Échanson et Cachottiers de ce mois de juin, une cuvée solaire tant par le nom, que par son terroir et sa dégustation : Sol 2020. Rencontre avec Karine qui a rejoint son mari au château en 2006.
Quelle est l’histoire du château ?
Le domaine vient de la famille de mon mari Nicolas, que nous gérons aujourd’hui tous les deux. C’est un domaine familial depuis 1881. Chaque génération a un peu marqué son empreinte. Il y a eu les bâtisseurs au départ, puisqu’il a fallu tout créer avec la construction de la cave, des bâtiments, de la maison. Ensuite, la grand-mère de Nicolas a eu le domaine à la fin des années 50. Elle a été précursseuse d’un virage qualitatif en agrandissant notamment la partie vigne pour faire autre chose que de la quantité. Malheureusement, dans le milieu des années 80, suite à des problèmes de santé, la grand-mère n’a pas pu maintenir le cap qualitatif. Il y avait un régisseur sur place, mais pendant les 15 années qui ont suivi tout a été vendu en vrac à une coopérative. Quand mon mari a repris en 2000, il y a eu un énorme travail à faire.
Du coup, vous êtes quasiment reparti d’une page blanche ?
Oui, mais c’est aussi un challenge. Notre première obsession était de retrouver de la vie dans les sols qui étaient très dégradés. Nous avons réduit, aussi, de 50 à 25 hectares et aujourd’hui à 23 hectares de vignes plantés pour faire moins, mais mieux et surtout selon nos envies. À l’époque nous ne nous disions pas que nous allions faire du bio, mais avant tout du bon vin et sur un sol vivant. Cela s’est fait petit à petit avec l’arrêt des engrais chimiques, puis des désherbants, introduire du compost, puis l’animal, et des couverts végétaux. Tout s’est fait au fil de l’eau. Nous sommes passés officiellement en bio en 2006.
Aujourd’hui, vous êtes en biodynamie certifié ?
Oui, on continue dans notre démarche de faire toujours mieux, de s’interroger, de chercher de nouvelles manières d’adapter le vignoble. Ce n’est même plus une volonté propre, c’est une nécessité aujourd’hui quand on voit l’évolution climatique. La vigne est soumise à de plus en plus d’extrêmes. Depuis 2012, 2013, ça s’est vraiment accentué. L’année dernière, on vendange le 16 août, l’année d’avant, on gèle le 9 avril avec une année précoce et des dégâts importants et du coup, tout ça nous oblige dans cette idée d’adaptation de la vigne et de sa capacité de résistance.
Vous pratiquez aussi l’agroécologie, c’est une réponse à cette interrogation que vous avez ?
Nous cherchons à développer la biodiversité pour casser la monoculture. Nous avons arraché des rangées de vignes pour y planter des arbres, alors que pourtant, nous avons déjà 23 hectares au milieu de 350 hectares de garrigues et de forêt.
En septembre, on sème des couverts végétaux dans les vignes qui nous servent à la fois d’engrais verts et qui protègent les sols pour toute la période de l’hiver et du printemps, même plus selon la pluviométrie.
On introduit aussi l’animal, puisque nous travaillons aussi avec un berger qui a fait pâturer ses brebis tout l’hiver et jusqu’à l’arrivée des premiers bourgeons au printemps.
Nous faisons notre propre compost depuis des années aussi.
Nous sommes mi-mai, en étant très prudents, comment percevez-vous ce millésime 2023 ?
Ce qu’on sait déjà de 2023, c’est que c’est une année très sèche, qui fait suite à une année 2022 déjà elle-même sèche. Nous sommes sur une année avec beaucoup de vent du nord depuis janvier. Les grappes des raisins sont déjà plutôt jolies. On devrait avoir une récolte qui s’annoncerait plutôt correcte, mais à suivre… Il faut encore rester très vigilant.
Parlez-nous du terroir des Corbières.
Nous sommes donc dans les Corbières, sur un petit massif montagneux, sur le versant nord. Il n’y a pas vraiment d’eau par la pluie, mais en profondeur par contre il y en a dans les nappes phréatiques. Les vignes globalement souffrant moins de la sècheresse. Il y a plusieurs effets, comme celui de la géographie, mais aussi notre travail en biodynamie et agroécologie. La vigne résiste bien et est moins soumise au stress. Nous accompagnons et développons la vigne à adapter ses capacités de résistances.
Sur les 23 hectares de vigne du château, tout est en appellation Corbières ?
Non, nous avons 14 hectares en Corbières et 9 en Vin de Pays. Nous avons fait le choix d’accompagner ce terroir frais que sont les Corbières, puisque nous sommes sur un sol de grès ferrugineux. Le grès, c’est une roche acide, qui se réchauffe vite la journée et qui se refroidit la nuit. Les amplitudes thermiques sont donc plus importantes et vont donner un côté plus frais aux raisins qui vont mûrir plus lentement. Nous avons voulu jouer là-dessus en faisant des vins assez légers.
Parlez-nous de la cuvée Sol qui sera dans la box des abonnés Échanson et Cachottiers en juin ?
Sol est un des vins de notre gamme les plus puissants, car elle vient de notre terrain le plus solaire, sur nos coteaux exposés sud alors que la majorité de nos vignes sont exposées nord. Le nom Sol est un hommage au terroir et au sol, puisque c’était notre obsession de départ, d’avoir de la vie dans les sols. Et puis en occitan « Sol », c’est le soleil. Elle est généreuse tout en conservant un côté très frais en dégustation. Si Marie-Dominique Bradford la propose en juin, c’est parce qu’elle peut aussi se déguster en été, avec une belle fraîcheur d’eucalyptus et mentholée.
Le dessin de l’étiquette a été réalisé au stylo bic par une amie artiste Nathalie Guida. Sa rondeur et sa finesse sont en adéquation avec le vin.
C’est un 2020, comment est ce millésime ?
2020 fait partie des années les plus pluvieuses qu’on ait eues. Il a fallu batailler contre les maladies, mais globalement, ça s’est bien passé. Sur cette cuvée Sol, nous sommes sur de la syrah et du Mourvèdre vigoureux et beaux. Nous avons eu un été très sec, qui a facilité la maturité. Ça a donné un millésime très équilibré, plus détendu, avec beaucoup de fraîcheur.
Les abonnés qui la reçoivent ce mois-ci, peuvent-ils la savourer de suite ou vaut-il mieux la mettre en cave et attendre un peu ?
On peut la boire maintenant, mais elle peut encore se garder. Il a un nez éclatant de fruit, floral et un peu épicé, qui évoluera sur des notes plus tapenades… Gourmandise assurée donc !
Autres portraits de vignerons du magazine de Trois Fois Vin qui pourraient vous intéresser:
Trois Fois Vin joue à Cache-cache avec le domaine Carrière Pradal
Bercé par la Loire, le chenin s’exprime avec finesse au Domaine de La Petite Roche